L'âge de raison
"La trentaine est un âge difficile. La vie est finie, l'existence commence."
(André Bay)
*
Passer des nuits blanches à espérer;
Profiter des journées noires pour créer.
Effleurer quelques rêves du bout des doigts;
Et effleurer une guitare pour la presque première fois.
Apprivoiser un Paris en vrai, étrange et secret;
Le porter aux nues, le subir chaque jour, aimer le détester.
M'emporter gaiement pour des lubies nouvelles;
Me découvrir des vocations dans de soudains excès de zèle.
Pratiquer le déménagement avec une certaine assiduité;
Quand dans une crainte du changement, je me décide à l'aduler.
Danser, beaucoup. Pour oublier. Pour exister;
Penser sans doute de trop dans une involontaire complexité.
Reléguer la douce période étudiante à de cocasses souvenirs
Et sur le fil des stages et de l'expérience, tenter un avenir.
Subir les échecs qui font mal comme ils font progresser;
Et puis pleurer, crier, hurler, pour mieux me relever.
Me nourrir de quelques instants de joie aussi;
Le bonheur fou qui ne se raconte pas et l'indicible euphorie.
Faire face au mutisme, à la disparition, à la réalité;
Poursuivre l'aventure de temps à autre avec une poignée de regrets.
Me surprendre et me faire violence jusqu'à me surpasser;
Pour effacer de biens fâcheux moments de laisser-aller.
Avoir des poussées d'adrénaline qui me donnent des ailes;
Quand la peur vient emplir la vie de feu et d'étincelles.
Saluer les rencontres qui ont embelli le chemin;
Celles qui parsèment mon présent ou l'ont jadis égayé un brin.
Voyager un peu, m'égarer parfois, m'évader constamment;
Dans un rythme haletant et un curieux espace-temps.
Jouer sur les paradoxes, sur les tensions et les ambiguïtés;
Puisque rien n'est simple ici, et que tout reste à prouver.
Mais enfin renier la facilité pour de bon et choisir mes passions;
Une exigence un brin fantasque pour mon âge de raison.
*
Oui décidément, elle m'en aura appris des choses cette dernière décennie...
De mes pires instants à un travail de mémoire exquis,
De mon insouciance à une prise de conscience enhardie,
J'aperçois à présent une quasi-maturité ainsi esquissée
Et encore tout un vaste monde à appréhender.
Alors, si à mon image, ma vingtaine demeurera imparfaite
J'attends désormais la trentaine, qu'elle vienne me tenir tête.
To be continued,
-Livy-