Le cinéma selon l'été 2009
Comme le veut la célèbre coutume de procrastination instaurée par moi-même en période de grande chaleur, j'entame un petit bilan cinématographique de l'été à la mi-août bien passée déjà. Et sans pour autant évoquer toutes mes séances de ces derniers temps dans les salles obscures, j'éprouve naturellement l'envie de vous parler de quelques films savamment triés sur le volet. Ceux-ci même qui ont su m'émouvoir, me faire sortir de mes gonds, me décevoir un brin ou me laisser sur ma faim, me faire trembler, pleurer, rire, trépigner d'impatience, demeurer neutre, sceptique, pleine d'enthousiasme, les yeux embués de larmes, un sourire au coin des lèvres, le regard critique, le coeur serré ou en émoi, les mains moites et l'imagination à son paroxysme. Autant d'émotions stimulantes pour ainsi garder bien ancrée la valeur la plus essentielle, celle de la vie et des rêves accomplis ou à venir, tout simplement.
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L'incontournable
Harry Potter et le Prince de sang mêlé de David Yates
Ca parle de quoi?
"Le pouvoir de Voldemort s'étendant à présent jusqu'au monde des Moldus, Poudlard n'est plus un havre de paix et Harry, qui entame sa sixième année au château dans la pleine fleur de l'adolescence, va devoir se préparer d'ores et déjà à l'ultime combat, en côtoyant d'une part Horace Slughorn, le nouveau professeur de l'école, afin de lui extirper des informations importantes, et en menant d'autre part une véritable bataille aux côtés de Dumbledore..."
Pas de déception à la clé pour un sixième opus magique à proprement parler, gorgé d'effets spéciaux et d'images impressionnantes, qui tient la route comme il tient le spectateur en haleine. Naturellement, la fidélité au livre est moindre, de nombreux détails sont omis et seule, l'histoire principale demeure implacable et suit sa trame avec sérieux.
Ceci étant, était-il possible, à la seule vue du nombre de pages de faire autrement?
Le long-métrage, sujet évident à l'enthousiasme de tous les fans d'Harry Potter, est aussi pertinent que différent des autres films et se révèle avec brio de par cet aspect plus mature et sans doute plus abouti également. Partant sur la base du roman qui, avançant grandement dans les aventures du petit sorcier et dans sa quête psychique, se veut plus complexe que les précédents, le réalisateur privilégie cette fois l'ambiance générale plutôt que l'histoire en elle-même pour nous offrir un film sombre et tourmenté, parfois même violent, qui prépare à merveille les deux prochains volets (réservés au tome 7) en effectuant ici une sorte de transition volontaire. Fantastique, drôle et touchant à la fois, l'aspect terrifiant qui se met progressivement en place pour la lutte finale est très implicitement évoqué, imposant certes moins d'action dans son ensemble mais aussi plus d'attention, tout en suscitant l'envie des films à venir, habile et ingénieux procédé...
Par ailleurs, cette évidente noirceur est agréablement contrecarrée par un côté très "teen movie" où les histoires de coeur de nos héros prennent de l'ampleur avec beaucoup d'humour.
Et c'est ainsi que l'angoisse omniprésente se mêle à une légèreté de bon ton, présente également dans le roman et qui a le mérite de relâcher une pression très forte ici, vouée à renouveler un engouement des fans sans cesse plus présent pour le monde magique et ses protagonistes grandissant.
On découvre alors des émotions certes contrôlées mais un film avide d'éclat et d'esthétique dont on ne pourrait reprocher que le dénouement, trop peu crédible voire plat et qui s'éloigne du roman pour se rendre hélas prévisible alors qu'il ne l'était pas.
De là, on attend cependant une fin en deux épisodes de toute beauté, qui saura, à l'image de sa transition ici présente, nous faire rêver une dernière fois, enchaînant à un rythme effréné une descente aux enfers, de l'action, du fantastique et de l'effroi, pour notre plus grand plaisir.
C'est un fait, Voldemort is back... et lorsque tout comme moi, on est atteint d'une "pottermania" aiguë, c'est bel et bien le plus beau des cadeaux ^^
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Une pluie de coups de coeur
Whatever works de Woody Allen
Ca parle de quoi?
"Boris Yellnikoff, excentrique new-yorkais misanthrope, cynique et fantasque laisse de côté sa petite vie confortable mais terne au profit d'une existence plus "bohême" quand il rencontre la jeune et jolie Mélody et qu'elle s'installe chez lui. Réticent au départ et lui transmettant sans ménagement ses implacables théories, il se laisse ensuite prendre au jeu de la joie de vivre et de l'insouciance de la jeune femme, l'ensemble créant alors un attachement mutuel très fort. Avec l'arrivée de la famille de Mélody à New York, tout se retrouve chamboulé. Désormais, plus rien dans la vie de Boris, ni ses habitudes, ni ses grandes réflexions, ne sera comme avant..."
A l'image du talentueux et anticonformiste Woody, changement total de registre ici après le sulfureux VCB que j'avais tout autant encensé. C'est au tour de cette "comédie sentimentale" pas comme les autres à présent de faire sensation et me transcender, au moyen d'un scénario empreint de cynisme et de répliques cultes qui jouent sur la corde sensible de la finesse et de la classe, un humour ravageur à la clé. La galerie de personnages est aussi intelligente que malicieuse et nous dévoile au travers d'une réflexion absolument immanquable sur l'ironie du destin, une énergie hors-normes pour un film qui à aucun moment ne perd de sa superbe. Péripéties, bons mots et situations incongrues, les dialogues sont subtiles et savoureux et les acteurs franchement talentueux tandis que Woody Allen se joue de ses héros comme de ses spectateurs et nous mène en bateau comme il se rit avec bonne humeur de ses personnages qui n'ont de cesse de se chercher, se confronter et se heurter encore et encore.
Surfant sur le scénario conventionnel du vieux râleur et de la ravissante idiote, il aborde avec légèreté des thèmes en réalité plus profonds qu'ils n'en ont l'air et nous livre toute une critique de la société, dans un état d'esprit sacrément déjanté et furieusement jubilatoire.
On rit, on prend parti, on s'esclaffe mais diantre, on réagit!
Et le long-métrage est purement et simplement un instant de bonheur délectable.
Tout un programme qui ne s'essouffle pas plus que lui, Woody, 75 ans, et des films qui se suivent sans se ressembler, nous entraînant dans son univers un peu fou et décalé mais toujours brillant et jamais égalé. Je dirais bien alors que Whatever works est l'un de ses plus grands films mais combien encore, en ces termes, devrais-je en englober?
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Là-Haut (Up) de Pete Docter et Bob Peterson
Ca parle de quoi?
"Carl, un vieux monsieur veuf et grincheux, décide de réaliser le rêve de sa vie en s'envolant avec sa maison, toute de ballons vêtue, vers l'Amérique du sud. Sans le savoir, il embarque avec lui Russel, un jeune garçon enthousiaste et gaffeur dans l'aventure.
Les deux compères, accompagnés d'un curieux oiseau et d'un chien qui parle rencontrés en chemin, vont alors vivre le voyage le plus imprévisible et incroyable possible, défiant les limites de l'imagination."
J'ai beau tenter avec fougue de trouver des failles à Up, je cherche toujours... et n'y parviens point. Plus inventif que Wall-e qui m'avait pourtant bien séduit l'an passé, le nouveau Pixar nous entraîne cette fois dans un monde imaginaire aux rêves aussi colorés que poétiques, entendez par là tout ce que j'aime et qui me tient à coeur, non sans un côté terriblement drôle et déjanté qui lui confère une force supplémentaire et le pouvoir de donner de l'émotion à tout moment, non sans une certaine dérision qui se laisse apprécier délicieusement, comme une sorte de cadeau bonus qu'on dégusterait à l'infini.
Graphisme au top et pertinence de l'histoire, nous sommes à notre tour, entraînés en pleine aventure délirante, ballottés entre le rire et les larmes, l'inventivité et le loufoque, comme pris au piège de personnages attachants et peu communs, avec en fond, toujours, l'élégance évidente de messages sublimés et d'une complexité voilée par cette très belle aventure irréelle, un brin "pop-acidulée".
L'univers enchanté de Up est en fait époustouflant de vérité et de fantaisie et se regarde la larme à l'oeil entre deux éclats de rire, paradoxe exquis d'un film d'animation à nous couper le souffle. Et si quelques longueurs peuvent être parfois à regretter, on n'en oubliera pas pour autant la capacité de Pixar à se renouveler encore et encore, étoffant sa galerie de personnalités à perte de vue et la délicatesse progressive avec laquelle est amenée l'aspect psychologique de chacun. Ainsi, le virtuel devient réel et l'on se perd à tout jamais dans ce monde en 3D, lunettes sexy à l'appui, où les maisons volent, où les chiens parlent et où finalement, entre moultes petites références de bonne augure, on se sent tout juste bien.
C'est ainsi qu'on ressort du cinéma intelligemment conquis, avec la satisfaction de ne pas avoir perdu notre temps et à vouloir nous envoler nous aussi, dans cet espace si aérien pour revivre encore et toujours, l'histoire simplement magique de Carl, Elie, Russel, Dug, Kévin... et leurs amis les écureuils, comprenne qui pourra ^^
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Mitigé
Le hérisson de Mona Achache
Ca parle de quoi?
"L'histoire inattendue de destins croisés, au sein d'un immeuble huppé, entre la jeune Paloma, 11 ans, intelligente et suicidaire, l'énigmatique, sage et perspicace monsieur Kakuro Ozu et la concierge des lieux, Renée, aux occupations secrètes tendant d'avantage à la littérature qu'aux tâches ménagères, malgré une apparences des plus trompeuses."
"Selon une libre adaptation du livre..."
Au moins le film annonçait d'emblée la couleur.
Et libre, il m'a semblé que l'adaptation l'était vraiment. Je ne cacherai pas ainsi que j'ai été un peu déçue par cette esquisse néanmoins poétique, mais qui m'a semblé franchement réductrice par rapport au roman piquant que j'avais tant aimé, et qui m'a laissé cette fois sur une image lisse et un peu trop gentille pour être honnête.
Pourtant, et je dois bien l'admettre, j'aurais sans doute apprécié d'avantage Le hérisson côté film sans avoir lu au préalable l'oeuvre de Muriel Barbery plusieurs fois. Le long-métrage, sans être transcendant, est en effet des plus plaisants à regarder. Truffé de bonnes intentions, de passages émouvants et autres détails charmants, il joue à merveille de cette "tendresse cynique", comme j'aime à l'appeler, qui me comble souvent de joie. Il sait de plus, parfaitement allier une certaine noirceur à un quotidien morne et prône avec ferveur la beauté de la littérature (du cinéma et du dessin) dans le cadre d'une leçon de vie particulièrement sensible et touchante.
Je ne nierai donc pas la beauté de la chose sur un sujet relativement grave et pesant.
Seulement, si je ne l'avais pas ressenti de la sorte dans le roman que j'avais trouvé acéré, créatif et juste, j'ai eu l'impression au sein du film d'un trop plein de clichés de la part des personnages, qui n'ont pas su convaincre de par leur naturel mais ont au contraire laissé entrer un flot de préjugés un peu trop faciles. Et moi, l'aspect "gentils et méchants" de la façon la plus évidente qui soit, je n'aime pas trop.
Je resterai donc sur cette petite parenthèse cinématographique qui demeure à mes yeux une jolie histoire mais sans plus, et ne pourrais que d'avantage conseiller le livre alors, qui lui, s'attache tout comme son titre, à une certaine élégance et des propos joliment nuancés pour certes d'avantage de cruauté au final mais également plus de réalité.
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Truc de filles ;)
Victoria (Les jeunes années d'une reine) de Jean-Marc Vallée
Ca parle de quoi?
" L'accès au trône de la jeune Victoria, 18 ans, son cheminement personnel et intellectuel et ses premiers pas dans le monde de la royauté pour celle qui fut l'une des reines les plus importantes d'Angleterre, connue notamment pour son tempérament, sa personnalité hors-normes et sa vision du monde."
Naturellement, Victoria n'est pas, et de loin, le meilleur film d'époque qu'il m'ait été donné de voir jusqu'à présent. La mise en scène plutôt convenue et l'ensemble linéaire, laissent indéniablement le spectateur sur une impression de "déjà vu" (Sissi impératrice, sans doute) et une intrigue qui demeure des plus classiques alors que la thématique trépidante, quant à elle, l'était tout de même beaucoup moins. Le portrait de la jeune reine, si romanesque oserais-je penser, reste donc relativement lisse et sans surprises ici, tant et si bien que j'ai un peu souffert de ce manque d'originalité et d'audace dans le scénario, je dois bien l'avouer.
Fort heureusement, les costumes et décors somptueux, le jeu délicieusement touchant d'Emily Blunt et l'histoire de cette jeune femme au destin hors du commun rattrapent vite les quelques défauts précédents, laissant alors place à une douce rêverie devant les robes merveilleuses, la tendre et légendaire histoire d'amour (jolie mais sans aucune niaiserie) et les erreurs de la jeune reine qui lui confèrent ainsi une fragilité charmante au réalisme évident.
Oui, le personnage de Victoria est humain, sensible et vrai et porte le film à lui tout seul sur une vague romantique des plus agréables, passionné par moments, dramatique à d'autres mais avec toujours beaucoup de raffinement et d'élégance, détails qui ne manqueront évidemment pas d'être appréciés à leur juste valeur.
Rien que pour ces raisons alors, le film mérite assurément le coup d'oeil, l'approbation de la gente féminine et un petit passage bien senti par la bibliothèque pour se renseigner d'avantage encore sur l'époustouflante et incroyable époque victorienne...
-Livy-